CDPV ! Engagez-vous, engagez-vous, qu’ils disaient !

Rédigé le 20/02/2024


Parler du recrutement en général, dont celui de la police, l’un des thèmes évoqués en assemblée générale de la Conférence des Directeurs des Polices communales vaudoises (CDPV) du 8 décembre dernier, c’est ouvrir la porte sur un monde en constante évolution.

On y verra une certaine analogie avec les vignerons qui, il n’y a pas si longtemps de cela, disaient que leurs client·es venaient leur acheter du vin ; ils soulignent aujourd’hui que leur vin, ils doivent le vendre… Ou comme cette fameuse tirade de la filmographie de Sacha Guitry, extraite d’une discussion mondaine : à la question « Alors, mon cher Maître, votre nouveau livre, on le vend ? » et la réponse de fuser « Oui, chère Madame, on le vend. Je ne sais pas si on l’achète, mais on le vend ! »

Difficultés de vendre une profession, de recruter en général

Ce n’est une surprise pour personne, les candidat·es de la génération Z, nés dès 1997, ne portent pas le même regard que leurs aîné·es sur un engagement à long terme. « Avant », par vocation, par tradition familiale ou simplement par intérêt pour le service public, les futur·es policiers·ières allaient au-devant des recruteurs. Ce n’est guère plus la règle de nos jours. D’ailleurs, si l’on croit certaines tendances européennes, et cela touche bon nombre de secteurs d’activité, les aléas du recrutement que rencontre une majorité de candidat·es tiennent dans :

  • Les autres opportunités examinées en cours de postulation : le premier choix, quel qu’il soit, se voit souvent relégué au second rang au profit d’un autre métier, dans un domaine similaire ou non ;
  • Le renoncement à postuler à un emploi intéressant en raison d’un accès trop complexe, d’un processus trop long et/ou fastidieux. Si ce n’est un mélange des deux aspects !

Et une fois engagés et formés à la pratique de leur nouvelle profession, encore faut-il que les jeunes « enrôlés » d’hier trouvent de bonnes réponses à leurs attentes, lesquelles ne sont pas forcément celles de la génération Y (de 1981 à 1996), et encore moins celles de la précédente, la génération X (de 1961 à 1980), actuellement « aux commandes ».

Attentes des nouvelles générations Y et Z

La génération Y (70% de la population active en 2030) marque sa volonté d’un équilibre entre vie professionnelle et personnelle, se disant motivée par la collaboration, par le besoin de comprendre, par des relations de qualité et de confiance avec la hiérarchie ou encore par une mobilité au cœur de son épanouissement professionnel. La génération Z, elle, se distingue par d’autres caractéristiques. Elle représentera 15% de la population active en 2030 et se veut adepte de l’innovation, des réseaux sociaux et autres outils collaboratifs. Elle exprime en outre un certain sentiment d’insécurité et d’incertitude dans sa relation au monde du travail, tout en voulant collaborer au sein d’une entreprise inclusive et responsable, avec des conditions et modes de travail flexibles et personnalisés, incluant la prise en compte des questions de santé (mentale comprise) par ses employeurs.

Les candidats à un premier poste de travail ont aujourd’hui le choix ; ils peuvent ainsi être à même de formuler des attentes qui ne sont plus celles d’hier. Chaque acteur, employeur privé ou public, s’adapte dès lors en conséquence ou est « prestement invité » à le faire. Mais cela peut prendre du temps. Les polices vaudoises (voir paragraphe ci-dessous « Et plus spécifiquement du côté de la police ? ») s’y emploient aussi.

De nos jours, changer d’emploi après quelques années n’est pas synonyme d’inconstance mais bien de dynamisme, de recherche de nouveaux défis relevant à la fois du goût du risque et de mise à profit des compétences acquises au fil des ans. Ou alors d’une volonté, de son plein gré ou pas, de tourner une page…

Les raisons qui poussent les nouvelles générations à quitter leur job

Parmi les principales, on citera l’insatisfaction en général, le manque d’opportunités de développement de carrière, l’inadéquation entre les attentes personnelles et la réalité du poste occupé, un manque de motivation ou d’épanouissement dans son travail. Mais aussi un déséquilibre entre vie professionnelle et privée, de mauvaises relations avec ses collègues ou sa hiérarchie, une rémunération jugée insuffisante, etc., le tout débouchant sur un désir de changement d’employeur, voire même d’une reconversion professionnelle.

S’il n’y a finalement rien de bien nouveau sous le soleil, les faits restent têtus. Dans la fonction publique ou ailleurs, toute promesse ne doit pas engager celui qui la croit… mais bien celui qui la fait. Et pas seulement lors du recrutement mais tout au long de la durée du contrat de travail. Or, dans le but de tendre à un « bon engagement », il devient non seulement nécessaire d’aller au-devant des candidat·es, de faciliter et raccourcir les procédures, mais aussi de permettre une souplesse de travail en termes d’horaires, de vacances, de temps partiels, comme de favoriser le télétravail s’il s’avère possible. Ce qui n’était de loin pas la règle auparavant, peine encore à s’imposer depuis la pandémie, au grand dam des nouvelles générations. Les séduire pour en retirer le meilleur ne doit pas être une gageure, un défi à court terme, mais bien un objectif sur la durée.

Et plus spécifiquement du côté de la police ?

Dans le cadre de l’Organisation policière vaudoise (OPV), favoriser et harmoniser le recrutement est l’objectif poursuivi par l’ensemble des polices vaudoises, cantonale et communales, bien conscientes des enjeux en cours. La pyramide des âges connaîtra un pic important au cours des 15 prochaines années : de nouveaux personnels, civil et uniformé, ainsi que des cadres et spécialistes seront à former dans l’intervalle. Les démarches lancées devront être en adéquation avec les attentes des uns et des autres afin d’assurer comme jusqu’ici la relève, un gage de pérennité de la sécurité publique et du bien-être de la population. Paraphraser Sacha Guitry pourrait ainsi annoncer la couleur et provisoirement conclure le propos : « Alors, mon cher Commandant, avec vos nouvelles méthodes, on recrute ? » – « On recrute en effet, chère Madame. Mieux encore, on engage encore mieux !

L’assemblée générale de la CDPV du 8 décembre 2023 en bref

  • Une quarantaine de délégué·es et d’invité·es ont représenté les 49 communes regroupant les neuf corps des polices communales vaudoises (PolCom), à Pully.
  • Le budget 2024 a été approuvé à l’unanimité, de même qu’une révision partielle des statuts de la CDPV.
  • Le président Jean-Marc Chevallaz a présenté un état des lieux positif de l’action des PolCom et de leur collaboration avec la police cantonale (Polcant), dans le cadre d’EVOPOL (évolution du paysage policier vaudois).
  • L’entrée en vigueur de la nouvelle péréquation intercommunale vaudoise (NPIV) et de la nouvelle facture policière attendent le verdict du Grand Conseil ; pour l’heure, elle reste prévue pour le 1er janvier 2025.
  • Le président de la Société des officiers des polices communales (SOPV) a rappelé le 70e anniversaire de sa fondation, fêté en octobre dernier, dont un compte-rendu figure dans l’édition d’hiver 2023 de ce magazine.
  • Le professeur Bertrand Yersin, orateur invité, s’est exprimé sur la « Police et médecine, complicité ou incompréhension réciproque ? », un thème sur lequel nous reviendrons dans un prochain numéro.

Article rédigé par Pascal Petter, Secrétaire général des Polices communales vaudoises.



Le président Jean-Marc Chevallaz avec, à droite, le vice-président de la CDPV, Pierre-Antoine Hildbrand, et, à gauche, le secrétaire général Pascal Petter.



La parole au président de la SOPV, le commandant Dan-Henri Weber.



Propos de bienvenue du syndic de Pully, Gil Reichen.



Le professeur Bertrand Yersin, orateur.